Au-delà du zonage, des plans et des règlements, l’urbanisme est aussi, et surtout, une discipline qui recouvre histoire, anthropologie, sociologie et art. L’alignement des arbres qui suit celui des bâtiments, celui des bâtiments qui suit la courbe du trottoir ou simplement les cordes à linge remplies qui forment ensemble une mosaïque de couleurs au-dessus des ruelles constituent différentes manières de percevoir la ville. Pour moi, c’est aussi ça l’urbanisme. C’est d’être sensible aux couleurs, aux formes, à la culture et aux gens, mais surtout à la manière dont ces gens vivent chaque coin de rue ou chaque escalier.
Les camps de réfugiés sont un phénomène spatial unique qui présente des défis sociaux et politiques particuliers. Ce sont des établissements humains où les conditions de vie et de survie sont constamment éprouvées par le décalage entre la volonté des sgouvernements à percevoir les camps comme des espaces simplement provisoires et la véritable permanence de ces lieux marginaux dans le temps. Ces établissements sont initialement déployés comme solution temporaire, se traduisant par une organisation spatiale et une gestion de même nature ne permettant pas de répondre adéquatement à la crise humanitaire persistante. En réalité, et contrairement à la volonté de plusieurs gouvernements, la durée de vie de ces campements atteint des décennies. Les camps se fixent et s’enracinent dans le temps et l’espace. Ils se réorganisent et s’urbanisent. Au fil des années, les réfugiés ne vivent non plus dans un espace universel et standardisé géré par l’aide humanitaire, mais plutôt dans un environnement qu’ils ont fait leur, au gré d’un urbanisme ad hoc qui reflète leurs aspirations, besoins et ambitions.
Comment l’organisation spatiale des camps de réfugiés peut-elle être repensée afin d’accroitre l’autonomie de ses habitants face à la prise en charge de leur milieu de vie ? Un nouvel urbanisme humanitaire doit se faire sur une approche basée sur les droits et libertés, qui met davantage en lumière la nécessité d’accorder aux réfugiés des dispositions habilitantes face à la création de communautés durables autant au chapitre de la planification que de la gouvernance.